Journée des HARKIS 25 septembre 2012

27 septembre 2012
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A l’occasion de la Journée nationale des Harkis (25 septembre 2012), le maire d’un petit village de Lorraine, ELZANGE,  a organisé une manifestation, en présence du préfet de Région et du sous-préfet, et a prononcé un discours que j’ai tout particulièrement apprécié. Le voici.


Nous voilà réunis ici, à Elzange, comme il y a dix ans, pour honorer la mémoire des Harkis, ces hommes, qui, il y a plus de 50 ans, ont cru juste, de soutenir la cause française en Algérie, et l’ont fait, souvent, au péril de leur vie. C’est, pour nous tous Français de 2012, un vrai « devoir de mémoire ». Mais, avant de rappeler l’engagement des Harkis et leur terrible déconvenue finale, je voudrais, en quelques mots, évoquer aussi toutes les autres victimes de cet effroyable conflit qui a peut-être fait, au total, entre 300 000 et 400 000 morts, auxquels il convient d’ajouter des millions de blessés –physiquement et moralement.

Je voudrais, aujourd’hui, cinquante ans après les événements, évoquer, sans aucun esprit partisan, l’ensemble des victimes du conflit :

  • Je pense à nos adversaires du moment, poussés à la révolte, par l’injustice du système colonial algérien, depuis le début du XIXème siècle.
  • Je pense à ces centaines de milliers d’Européens, dénommés « pieds noirs », qui avaient été jetés depuis deux ou trois générations sur cette terre algérienne, qu’ils avaient travaillée et considéraient finalement comme la leur, et qui se sentirent « trahis », abandonnés par les gouvernements français, et obligés à un lamentable exil en métropole.
  • Je pense aussi aujourd’hui à ces millions de militaires français –engagés et appelés-, que l’on persuada de faire une guerre aux objectifs mal définis. 24 614 y laissèrent leur vie, et beaucoup plus leurs convictions morales.
  • Je pense enfin et surtout, aujourd’hui, aux 160 000 harkis, moghaznis, GMS, qui ont cru en la France et se sont engagés à ses côtés. Une France, qui après les avoir utilisés dans les tâches les plus meurtrières du conflit, les abandonna à leur sort lorsqu’elle quitta l’Algérie au printemps 1962.

Seuls 42 500 d’entre eux purent trouver refuge en France métropolitaine,    grâce à des officiers courageux, bravant les directives gouvernementales. Aujourd’hui, avec leurs descendants, ils représentent une communauté de 500 000 personnes.

A l’époque, en 1957-1959, modeste sergent engagé en Algérie, j’ai eu, comme beaucoup d’entre vous le savent, l’honneur de commander pendant quelques mois une Harka en Kabylie. J’ai côtoyé de près ces hommes, certains jeunes, la plupart beaucoup plus âgés que moi, certains n’ayant pas l’expérience des armes, d’autres ayant servi avec honneur durant la Seconde guerre mondiale. J’ai senti, au début, leur méfiance à mon égard, mais, très vite, nous avons établi entre nous des liens de confiance, que je n’ai jamais oubliés.

Aujourd’hui, en 2012, il est facile pour la jeune génération d’ironiser sur la sincérité de l’engagement des harkis. Il n’est certainement pas faux d’affirmer que, souvent, on exerça sur eux des pressions ; qu’on les alléchât par des primes, mais il serait malhonnête de réduire à cela leurs motivations. Beaucoup, j’en suis persuadé, en s’engageant aux côtés des Français ont eu le sentiment de choisir la voie la meilleure pour leur avenir et celui de leur peuple.

Et une telle idée n’était nullement saugrenue.

Si l’indépendance était fatale et souhaitable, il n’était pas fatal qu’elle se déroulât dans les conditions dans lesquelles elle a eu lieu, par la faute des extrémistes des deux camps.

Il aurait pu, il aurait du y avoir au sein du nouvel Etat une juste place pour les Harkis comme pour les pieds noirs. Ce fut hélas !, on le sait tout le contraire !

Osons dire cinquante ans après les faits, que le massacre des Harkis en 1962 restera pour les deux pays, la France et l’Algérie, une tâche indélébile.

Et sans pouvoir réparer ces malheurs, que la France de 2012 témoigne, au moins, aux rescapés, son respect et sa gratitude. C’est pourquoi nous sommes là aujourd’hui.

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